Même si le gouvernement signait un chèque en blanc pour la réforme fiscale proposée par les entreprises, cela ne relancerait pas l'investissement. «La reprise n'est pas tributaire de la réduction d'impôts mais plutôt de la confiance dans l'économie.
Il ne faut pas chercher des solutions qu'au niveau de la fiscalité. L'économie a besoin d'autres réformes pour une meilleure efficacité», prévient le Pr. Mohamed Berrada, ancien ministre des Finances et président de la commission scientifique des assises de la fiscalité, mercredi dernier au Centre Links au cours d'une conférence sur la fiscalité. «Notre problème, c'est d'abord la création de valeur», complète un intervenant.
Mais, le levier fiscal peut être un ingrédient pour la confiance. Les propositions de différentes organisations convergent toutes vers la baisse de l'IS. Il existe plusieurs taux dont un barème progressif de trois niveaux (10%, 17,5% et 31%), un taux de 37% appliqué au secteur financier et un taux réduit de 8,75%. En intégrant les mécanismes d'optimisation prévues par la loi, les taux réels sont bien inférieurs aux tarifs faciaux. Il n'empêche que les bénéfices des entreprises marocaines sont parmi les plus taxés par rapport à plusieurs pays de benchmark. C'est une faiblesse supplémentaire face à la concurrence sur les marchés étrangers par exemple.
La conjoncture a créé beaucoup d'attentes autour des assises de la fiscalité. Mais, «elles pourraient se transformer en frustration puisqu'elles ne peuvent être toutes satisfaites à court et moyen terme», prévient Pr. Rachid Lazrak, conseil juridique et fiscal. Hors prélèvements fiscaux et sociaux, la pression fiscale se situe à 21%. Au-delà de ce chiffre qui ne donne pas un aperçu réel du poids des impôts, la concentration de l'effort sur une population réduite de contribuables et la qualité discutable des services publics cruciaux comme l'enseignement rendent la pilule amère.
L'élargissement de l'assiette reste un vrai problème. La structure de l'économie marquée par un important secteur informel explique en partie la non maîtrise de l'assiette et la difficulté à cerner l'évasion fiscale. La faiblesse des moyens dont dispose l'administration fiscale est également en cause. Sur les exonérations par exemple, l'administration se retrouve elle-même piégée par certaines dispositions, estime un intervenant. «Les dérogations fiscales posent un vrai problème. Elles ont été concédées à tort et à travers sans évaluer leur impact. Dans l'immobilier par exemple, des incitations ont été accordées à des entreprises qui au final détruisaient des emplois», regrette le Pr. Mohamed Berrada.
Les nouvelles technologies offrent une vraie opportunité à l'administration fiscale pour accélérer sa transformation pour plus d'efficience. Mais, à elles seules, les nouvelles technologies ne peuvent être la solution. La simplicité et la cohérence des règles sont essentielles. «Nous avons des informations sur les gens qui opèrent dans l'informel, mais nous faisons aussi notre travail avec humanisme», indique un cadre de la DGI. L'administration peut faire preuve de mansuétude dans certains cas. En revanche, sa position envers certaines professions libérales durant des années laisse perplexe.